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Le trek à la découverte de l’ours

KODIAK carnet de voyage 19Paysage paisible, grandiose, au fond d’un immense fjord, où un bon observateur, jumelles rivées sur les yeux, commence à apercevoir toute l’agitation de l’éveil de la nature : tiens la marée est basse ! Mille oiseaux s’envolent et se posent en alternance, quelques vaguelettes agitent la petite barque de Harry. Deux cerfs peuvent être distingués dans le lointain, des canards et des mouettes virevoltent…

KODIAK carnet de voyage 10Départ pour le « trek » enfin !! Deux heures de marche intense, première partie d’environ une heure, sur la rive, à marée basse, entre glissades sur les rochers et pas prudents sur les graviers, en évitant les algues traitresses !

Premier arrêt contemplatif : le paysage enfle, s’expose, se montre, le soleil caresse les collines en levant les derniers voiles des brumes matinales, et on aperçoit… trois ours entrain de déambuler sur la rive opposée : petite famille bien tranquille, où la mère veille sur sa progéniture, un des deux oursons parait hardi et pressé, l’autre plus poète, s’attarde apparemment sans raison… Le dilemme maternel, lequel est en danger, lequel protéger, lequel sermonner ??

Quelques cascades d’eau pure permettent de remplir nos gourdes.

Enfin après cet âpre cheminement, nous voici pour une deuxième heure devant d’autres difficultés, dans les hautes herbes, traversant de petites futaies, des épilobes déjà rougeoyants annonçant l’automne.

Nous empruntons les chemins tracés depuis une éternité par les ours eux-mêmes, ils sont étroits, boueux, parfois à flanc de coteaux ; puis enfin le terrain s’aplanit, la rivière apparait et alors…c’est l’attente, car tout ici se mérite, l’ours ne vient pas à notre rencontre, il n’y a pas de spectacle prévu à heure fixe, séances en matinée, en soirée, ou relâche le week-end…non…c’est la nature qui commande.

S’il fait très chaud, l’ours ne se montre pas, il reste à couvert pour ne pas souffrir de la chaleur qui est encore présente en cette fin d’été. S’il pleut beaucoup, c’est nous qui seront en difficulté pour nos photos... mais l’ours lui n’en aura que faire.

KODIAK carnet de voyage 03Enfin l’ours de Kodiak, ou le Kodiak tout simplement, ou l’ursus arctos minddendorffi apparait :

Car maintenant il lui faut manger, il faut faire du gras, car sinon point de survie pendant les longs mois d’hiver en hibernation.

Il y a dans son comportement à la fois une impatience, une boulimie où le temps imparti à son engraissement parait être l’urgence, et en même temps une sensation de stabilité, donnant l’impression qu’ici ce sont des gestes éternels que rien ne pourra interrompre jamais.

A l’affût, tirant à vue, oh pardon !! Uniquement au travers de nos très longs objectifs, voulant ainsi, s’approcher au plus près, que dis-je, au poil près !!! On concrétise en quelques instants les rêves datant du jour où décision prise, on savait qu’enfin on irait à Kodiak,

Mais l’ours, lui, parait certes indifférent à notre présence, mais en fait, il nous senti, puis vu, bien avant nous.

Il balance lentement sa tête de droite à gauche, et avec son museau il hume l’atmosphère…spectacle…spectacle…est-il de connivence avec Harry et Brigid Dodge qui, de mai à septembre depuis une trentaine d’années, ont accueilli des touristes pour leur faire partager cet univers si particulier de la parfaite harmonie d’un des plus grands mammifères en liberté, et encore si peu sous contrôle de l’homme avec la nature. Si vous êtes impatients, venez tout de suite regarder la vidéo !!

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Lui c’est le saumon qu’il guette, et nous c’est sa présence et son comportement.

Il est immergé dans la rivière qui peut le recouvrir jusqu’au garrot, met son museau carrément dans l’eau, il le voit alors, brillant, scintillant ce saumon, qui remonte la rivière pour frayer et mourir, et l’ours se précipite et dans une explosion de gouttelettes, il s’emballe, il court, et parfois, il l’attrape, il se dirige alors sur la rive, le saumon frétillant entre ses mâchoires, il dépèce le poisson à vif, celui-ci est encore parcouru de soubresauts, la vie s’en va pour la survie de l’autre, mais ce saumon dont les jours étaient comptés, va participer au cycle de la nature. Seul tel un bon poissonnier, il lève les filets, et laisse

Peut-il s’arrêter, non, il y retourne, il chasse indéfiniment dans cette boucle de la rivière, puis s’en va après un peu plus loin, nous obligeant à nous déplacer dans des fourrés épais, parsemés de la chasse de la veille, du matin ou d’il y a dix jours.

L’odeur de poisson en décomposition est très présente, parfois incommodante, elle nous accompagne, les cadavres délaissés par le Kodiak, témoignant ainsi de l’activité incessante des ours, profitent également aux mouettes et aux aigles chauves qui finissent le travail. L’ours, tel un bon poissonnier, ne lève que les filets, il laisse aux autres la laitance, qui parfois flotte dans les cours d’eau, la tête et l’arête centrale encore fournie, surgit sous nos pieds, allant d’une coloration du blanc nacré au brun violacé.

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Y avait-il un, deux, dix ours en même temps ?

Situation très variable, en effet ils apparaissent parfois seul ou en nombre, mais toujours restreint, d’environ 5 au maximum.

La plupart du temps nous les avons vus chasser en solitaire, l’un après l’autre dans une même boucle de rivière; on a assisté à une éviction respectueuse, où le dominant ou la dominante revendique son territoire de chasse et l’autre s’en va…chaque ours fait ses courses sur son territoire, mais semble le partager, à des heures différentes avec ses congénères. Notre ourse, enfin celle qui fut fidèle aux rendez-vous quotidiens, était une ourse d’environ sept ans, balafrée, une profonde entaille barrant le tiers arrière de sa croupe, cicatrisée de longue date, mais stigmate d’une lutte à mort dont elle est sortie victorieuse. Certains matin cinq ours sortaient des fourrés tandis que nous étions en approche, d’autre fois, de longues heures d’attente était le prix à payer pour enfin les revoir.

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Le comportement réciproque :

Quel comportement adopter ?? tantôt Brigid nous précède et Harry ferme la marche fusil accroché au sac à dos, et parfois c’est l’inverse ; ils nous indiquent où nous planquer, derrière des petits buissons ou un arbre mort, mais Harry toujours très flegmatique, nous fait jouer sur le devant de la scène, accroupis devant le tronc d’arbre abattu et nous immobiles, accroupis, en position «  statue », voyant l’ours passer à deux mètres de nous, préoccupé par sa chasse au saumon et pas par la présence de ces « touristes » amateurs de sensations !! on dit photographes animaliers à vos téléobjectifs et très grandes focales, et nous nous répondons, le grand angle est aussi indispensable!!! Parfois l’ours part et suit les méandres de la rivière, faut-il le suivre ? La progression est toujours difficile entre les restes des saumons, les arbres morts aux branches enchevêtrés, les trous invisibles, les hautes herbes, le bord glissant de la rivière : est-il loin, près, revient-il, sera-t-il sur le chemin que nous empruntons actuellement ? La consigne, suivre nos guides, ne pas faire de bruit, ne pas parler, s’accroupir si l’ordre en est donné, et avoir une tenue de camouflage, le visage même couvert, en fait se confondre avec la nature. Eux, briquet à la main recherchent le sens du vent, afin que l’ours ne soit pas surpris s’il ne n’avait pas détecté notre présence et éviter ainsi une attaque.

L’environnement immédiat :

KODIAK oiseaux057 1124 900 600 100La rivière apparaissait au début de l’automne noire ou rouge, envahie par la multitude des saumons, mais depuis quelques années, leur remontée est moins franche, et se fait attendre, il n’y a que des scintillements intermittents indiquant la présence des poissons…changement de climat ? Que serait alors le destin des ours bruns de Kodiak si…leur principale nourriture venait à manquer ??

Les aigles chauves, pygargues à tête blanche, (bald eagle) en poste d’observation au sommet des arbres morts, ponctuent le paysage ; qu’ils paraissent statiques, nous voudrions un envol à saisir et à immortaliser dans nos boitiers !!

Et finalement presque nonchalamment ils se décident. Très grand et bel oiseau, emblème des Etats Unis d’Amérique, bec jaune, œil clair, griffes acérées, plumes noires, tête blanche.

Des petits oiseaux sont parfois le seul dérivatif à nos longues attentes entre deux apparitions de l’ours : martin pêcheur d’Amérique, petit oiseau gris, mouettes à l’affût de nourriture au plus près des ours, pies.

Loutres de rivière, jamais entendu parler ! Mathieu de Terres Oubliées, m’avait prévenue, il n’y a pas que l’ours à découvrir : une marche très difficile, où même les bottes n’ont pas résisté aux assauts du sac et ressac de la marée montante ; la progression au bord de la plage qui est elle-même recouverte d’arbustes pieds dans l’eau, nous fait douter de l’intérêt d’aller rencontrer ces petits animaux : nous avons déjà vu à plusieurs reprises des loutres de mer, alors de rivière !!! Depuis je me suis documentée et est découvert que ces petits animaux existent en Europe de façon sporadique et qu’il y a un photographe animalier passionné par ces loutres et qui propose de magnifiques photos. Elles sont d’une grande vivacité, et comme toujours, elles nous ont repérés, sont aux aguets, amis, ennemis, les voici pissant et d’éjectant pour marquer leur territoire, affirmer ainsi leur souveraineté, leur antériorité territoriale (simple sous espèce de l’ensemble des mammifères, copier-coller de nous-mêmes ?); la curiosité l’emporte, d’une nage rapide elles viennent vers nous. Le chien, ce tout fou, Loyal, un jeune labrador noir, amour de nos guides, risque de mettre en péril cette rencontre par son agitation et ses aboiements.KODIAK carnet de voyage 04

Bon à savoir

On ne peut pas aller partout sur le globe.

Si on en a la chance bien sûr rien ne vaut l'expérience de terrain.

On peut cependant participer en direct à la vie animale en les regardant agir grâce aux web cams installées de part de le monde, dans des lieux de plus en plus reculés: faites un tour par exemple avec les ours de Katmaï qui se régalent de leur pêche aux saumons, c'est EN CE MOMENT, en juillet, ensuite ils vont sur un autre spot pendant le mois d'août, pour réappaaraître en septembre.

KATMAI NATIONAL PARK, BROOKS FALLS (chutes de la rivière Brooks) en Alaska: http://explore.org/live-cams/player/brown-bear-salmon-cam-brooks-falls#sthash.3KtZvrLx

Dans "anecdotes et contes"

Illustration du conte inuit "la femme squelette"Le conte inuit de la femme squelette

Elle avait fait quelque chose que son père désapprouvait, mais dont personne ne se souvenait. Toujours est-il que son père l'avait traînée jusqu'à la falaise et précipitée dans la mer. Les poissons avaient mangé sa chair, dévoré ses yeux. Et elle gisait sous les eaux, son squelette ballotté par les courants.

Un jour, arriva un pêcheur. En fait, ils étaient plus d'un à pêcher à cet endroit, mais celui-ci avait été entraîné bien loin de chez lui et il ignorait que les pêcheurs des environs se tenaient à l'écart de cette crique, disant qu'elle était hantée.

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