D’Eagle Plains à Benson Creek :
km 371 : Benson Creek - 29 juillet 2008 – 9 heures du matin
C’est reparti, mais attention, une voiture complètement retournée sur le bas côté, à la sortie d’un virage, les quatre roues pointant vers le ciel, nous invite à la prudence : la route est glissante, détrempée par les importantes pluies de la veille.
La route s’étire, tantôt en ligne droite, tantôt en lacets, comme dans les cols de montagne, mais sans qu’il y ait de dénivellation franche, entourée d’une nature calcinée par les incendies de 1999.
Et puis, ce sont des montagnes russes, nous faisant remonter sur un plateau, tandis qu’au loin apparaît une chaîne de montagnes barrant l’horizon : la chaîne des Ogilvie.
km 320 : Lac Midway
Site d'un festival de musique, chaque été.
km 257 – 259 km : Belvédère sur la chaîne des montagnes Olgivie
Ce belvédère offre ici un superbe panorama, avec une vue exceptionnelle sur l’ensemble de la chaîne des Ogilvie ; le point culminant est le mont Frank Rae, à 2 362 mètres d’altitude.
Cet endroit surplombe le bassin hydrographique des rivières Ogilvie et Peel, un autre point de la limite de partage des eaux : les rivières serpentent au milieu de la forêt boréale. La portion ouest se déverse dans les rivières Eagle et Porcupine et dans le fleuve Yukon vers l’océan Pacifique ; Vers l’est, les terres se drainent vers le fleuve Mackenzie, qui se jette dans la mer de Beaufort et l’océan Arctique.
La végétation s’amenuise, formant une végétation rabougrie, laissant place à la toundra et à des petites épinettes : chaque touffe peut sembler comporter plusieurs arbres, mais il s’agit d’un seul arbre qui s’est « cloné » et « multiplié » à de nombreuses reprises : c’est une des caractéristiques de la toundra arctique ; les cristaux de glace balayés par les vents, qui soufflent ici en hiver, lacèrent l’écorce des arbres.
Des présentoirs expliquent l’évolution géologique et culturelle de l’endroit.
Au-dessous du panneau où est écrit « Olgivie Ridge », est inscrit « Gwazhal Kak », pour nous rappeler que ces terres ont été occupées par les Premières Nations.
km 257 – km 223
De ce plateau, du sommet duquel serpente la Dempster sur une petite crête, nous descendant dans la ligne continentale de partage des eaux. Au km 237 : aire d’atterrissage. Nous filons vers le lit de la rivière Olgivie : l’espace se rétrécit, les montagnes nous enserrant comme un étau ; elles deviennent de plus en plus pelées, d’aspect grisâtre, ressemblant aux Rocheuses, en harmonie sévère avec la route dont les graviers sont d’un gris foncé, puisqu’ils proviennent des éboulis qui ont servi à construire la route.
Dans cette partie nord des monts Olgivie, il y a des lacs, des lacs miroirs, de couleur très sombre, dans lesquels se reflètent des épinettes tourmentées par l’effet du pergélisol qui a soulevé le sol où sont enracinés des pins et des épinettes noires ; elles sont obliques en tout sens, comme si elles avaient bu (« drunken forest ») !
Avant de franchir la rivière, apparaissent des montagnes, en forme de cône, comme des terrils faits de fin gravier noir, sans aucune végétation, ajoutant encore au caractère sévère du paysage
km 196 : Camp d'entretien de la Dempster
Cette route est régulièrement entretenue, pour rester praticable malgré les rigueurs du climat. En exemple, ici, à côté du pont enjambant la rivière Olgivie, voici un camp d’entretien de la route, parmi plusieurs échelonnés le long de la Dempster : entretien au cours de l’année, mais aussi déneigement en hiver.
km 195 : Pont sur la rivière Olgivie
Le pont a été construit, là-encore, par les ingénieurs des Forces canadiennes, comme un exercice d'entraînement. La rivière coule dans une vallée entourée de montagnes et de forêts.
km 178 : Dépôts minéraux et pistes fréquentées par les mouflons de Dall
Les mouflons sont attirés par les minéraux qui abondent à cet endroit ; ils descendent les flancs rocailleux pour venir lécher le limon riche en minéraux qui tapissent les berges de la rivière. Les pistes qu’ils empruntent sont facilement repérables sur les flancs des montagnes.
km 168 : ruisseau « Red »
On longe une rivière ferrugineuse, dont les pierres ont une couleur rouge brun. Les taches de couleur sur les roches, au fond du ruisseau Engineer et dans les alentours, proviennent de minerais dissous. L’eau a une haute teneur en sels minéraux.
km 154 : Col Windy
Ce col marque la division entre le bassin hydrographique de la rivière Blackstone et le ruisseau Engineer. Le manque de végétation dans cette région fait qu’il s’y produit de temps en temps des crues subites. On peut facilement suivre des yeux les sentiers de migration des caribous, taillés dans la surface grise et chauve des montagnes ; depuis des milliers d’années, la harde de caribous de la Porcupine hiverne dans la région.
km 132 – 82 km : Hautes terres de la rivière Blackstone
Nous sommes dans un environnement de montagnes au sommet gris, très pierreux : sur la droite, sur la gauche, mais aussi droit devant nous, les chaînes descendent comme pour se rejoindre dans le lointain, au fond d’un entonnoir. La Dempster est juchée sur une crête très sinueuse, écrasée par un ciel menaçant charriant de lourds nuages, surplombant le lit de la rivière. La rivière Blackstone, presque rectiligne, paraît immobile, large, parsemée d’îlots de terre et de cailloux, recouverts d’herbes ou de petits arbustes se reflétant dans l’eau d’un gris foncé, opaque mais métallique ; elle réfléchit la lumière du soleil qui a réussi a filtré de la couche nuageuse : paysage à front renversé, puisque c’est la rivière qui semble éclairer le ciel ! Paysage irréel, d’autant plus, qu’au milieu du lit de la rivière, il y a une dizaine de chevaux, en toute liberté.
km 125 : Aire d’atterrissage
km 118 : Lac Chapman
C’est un des plus grands lacs le long de la Dempster. Vaste regard sur la toundra subarctique. Nombreux présentoirs sur les hautes terres Blackstone, le peuple Gwich’in et la tragédie de la « Patrouille Perdue ».
km 104 : Lac Two Moose
Une grande voie d’arrêt et un belvédère du côté ouest de la route surplombent le lac « Two Moose », le lac aux deux orignaux ; nous ne les verrons pas, mais nous apercevrons des canards d’Amérique sur les rives du lac.
At the kilometre 90 marker is the beginning of the Blackstone Uplands. OGILVIE RIVER - Kilometre Yukon 168 to 237 - The Ogilvie River Valley portion of the Dempster Highway follows Engineer Creek to Ogilvie River.
km 82 – km 75 : Belvédère du North Fork Pass
Ce col est à 1289 m d’altitude : c’est le point le plus élevé de la Dempster. Panorama exceptionnel avec vue plongeante sur la vallée de la rivière Klondike et les montagnes aux roches noires : le mont Tombstone était un point de repère pour la Gendarmerie royale à cheval du Nord-Ouest, ainsi que pour les trappeurs. On traverse une nouvelle fois la ligne de partage des eaux : au nord, les terres se drainent vers l’océan glacial Arctique par l’intermédiaire des rivières Blackstone, Ogilvie, Peel et par le fleuve Mackenzie ; au sud vers l’océan Pacifique par la rivière Klondike et le fleuve Yukon.
km 73 : Centre d’interprétation du mont Tombstone
Créé en 1999, le parc territorial du mont Tombstone est situé dans la chaîne de montagnes des Ogilvie, au nord de Dawson City. C’était une partie des terres traditionnelles et culturelles des Inuits et des premières Nations. Il est constitué de deux types très différents de paysages : au nord, la toundra arctique ; au sud, les montages et la forêt boréale. Nombreux présentoirs offrant des renseignements sur l’histoire naturelle de la région et sur ce nouveau parc territorial.
km 73 – km 27
Une grande partie de la route suit la rivière Klondike, délaissant les reliefs montagneux, le plus souvent rectiligne, passant à côté d’un lac où se dresse une hutte habitée par une famille de castors (« beaver pond and lodge »).
km 27 : Bensen Creek
21 heures : on tourne à gauche, en suivant le panneau indicateur sur le bord de la route ; le ruisseau s’appelle Benson Creek, mais là où nous sommes censés dîner et dormir se nomme « Bensen Creek Wilderness Retreat » ; allons donc comprendre quelque chose après deux jours sur la Dempster ! Un petit kilomètre de flaques d’eau d’un orange extraordinaire, d’une densité extrême, donnant un aspect glauque, là-encore dans la plus grande solitude. Nous avançons, moulus par la Dempster, ses paysages à couper le souffle, mais sans être préoccupés d’un quelconque horaire pour arriver, là où nous sommes attendus ; mais le sommes-nous vraiment ? Personne pour venir à notre rencontre, là où il y a obligation de laisser le véhicule ! Et puis, au détour d’une courbe sur ce chemin peu praticable, car il a beaucoup plu, tout d’un coup, apparaissent un chalet, un pick up, une moto, un chien qui aboie : nous ne sommes pas rassurés ; sur quoi et surtout, sur qui allons-nous tomber ?
Il est prêt de 21 heures 30. Une silhouette apparaît, s’exprimant en Français : « Ah ! c’est vous, je me faisais du souci, j’avais peur qu’il ne vous soit arrivé quelque chose, car il est tard ». C’est Gérard, le propriétaire des lieux, un Français, ayant quitté l’Hexagone pour les grands espaces et la solitude, qu’il a trouvés au Yukon, à quelques dizaines de kilomètres de Dawson City. Il a construit tout seul sa maison, reçoit ses hôtes avec grande gentillesse, et organise des virées dans la nature. Parler Français, après plus d’un mois à essayer de s’exprimer en Anglais et de comprendre ce que l’on nous dit ; manger Français : des légumes apprêtés comme on en a l’habitude, des oignons rissolés à la poêle, un steak au poivre, des fraises au sucre et à la crème…oui nous avions eu raison de choisir cette étape tampon entre ce raid, qui nous avait finalement mis face à nous-mêmes, et le retour à cette civilisation, qui nous apparaît indispensable, mais dont nous n’avons cesse que de nous en échapper ! Le lendemain, promenade interprétative le long de la rivière Klondike et nombreux échanges avec Gérard.